Nouvelle École
Le divertissement au prix de l’ambition.
Netflix a sorti le mois dernier la première saison de sa version française de Rhythm + Flow.
Promettant un gain de 100 000 euros et une mise en avant importante au vainqueur, on espérait que l’émission nous proposerait un processus de sélection ambitieux, nous permettant de découvrir de nouveaux artistes émergents. Cependant, le programme n’a pas tout à fait rencontré nos attentes.
Pour être plus précis sur comment on imaginait la série, on pouvait penser à deux modèles totalement opposés mais tout aussi efficaces. Le premier aurait été de juger uniquement les candidats sur leur univers artistique, en se demandant qui serait le plus crédible sur le devant de la scène d’aujourd’hui. Le second quant-à-lui voudrait que le programme s’inscrive dans une logique d’accompagnement, où les artistes seraient jugés sur des qualités plus techniques, tout en les laissant développer leurs univers au fil des épisodes. L’objectif de l’émission devrait être en effet que l’artiste vainqueur (et plus généralement tous les candidats) partage une proposition artistique assez forte et mémorable pour que sa hype ne descende pas en même temps que celle de la série.
Des choix de productions qui laissent à désirer.
La production a cependant fait un choix hybride qui n’a pas les avantages des deux propositions évoquées. Les participants sont jugés au fil des épisodes uniquement sur des aspects techniques. Cependant, ils n’ont pas le temps d’évoluer au cours du programme. C’est un choix facile parce qu’il est plus simple de faire la différence entre les candidats sur des aspects pratiques que artistiques. De plus, il aurait été totalement possible de trouver que des candidats techniquement très bons lorsque l’on voit à qu’elle point les petites scènes en regorgent. On pourrait presque se dire que l’énorme écart de niveaux entre les candidats est volontaire…Ce besoin de choix simples et de spectacle est renforcé par la sélection des épreuves. Dès la phase de présentation passée, les artistes s’affrontent sur des freestyles et battles. Ces épreuves donnent évidemment au jury des décisions plus faciles à prendre que lorsque les candidats présentent des clips ou des feats. Cependant, ces vingt dernières années nous ont montré que les rappeurs excellant dans l’art du freestyle ou de battle ne devenaient pas forcément de bon artiste studio ou live. Le programme est construit de telle sorte que les choix de Shy, SCH et Niska nous paraissent cohérents. Cependant, ces décisions ne répondent pas à la question initiale : quel candidat mérite le plus de se retrouver sur le devant de la scène ? L’année séparant le tournage et la publication de l’émission nous a permis d’avoir la réponse.
Il faut tout d’abord admettre que le programme a donné un important coup de projecteur à l’ensemble de ses participants. En particulier, Fresh, le gagnant, est aujourd’hui présent dans les chartes de toutes les plateformes de streaming. Cependant on observe aussi que certains candidats partis parmi les premiers éliminés sont aujourd’hui parmi les plus écoutés. Plus généralement, à part pour Fresh, on ne remarque pas du tout de lien entre le classement final et la popularité actuelle. On peut même s’interroger sur la suite de la carrière du vainqueur, lorsque d’autres artistes plus connus reviendront sur le même créneau que lui.
Nouvelle École reste un très bon divertissement, mais j’adore regarder Top Chef alors que je ne mange que des pâtes.
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